Trois bouillons froids d'été
pour changer de l’éternel gaspacho et de l'Ajo blanco qui sont délicieux mais qui n’ont pas le monopole de vos tablées estivales.
Une fois par mois, je partage avec vous plusieurs recettes de cuisine et de pâtisserie, intégrant des connaissances en phytologie, en cueillette sauvage, ainsi que des conseils naturo de prévention de santé où la gourmandise et le plaisir restent centraux.
Dans de nombreuses cultures, on consomme aussi des bouillons froids qui ont la particularité de rendre hommage aux saveurs des légumes gorgés de soleil. C’est pourquoi je vous propose quatre recettes simples à faire pour changer de l’éternel gaspacho et de l’ajoblanco qui sont délicieux, mais qui n’ont pas le monopole de vos tablées estivales.
Selon vos balades, cueillettes, vous pouvez agrémenter les quatre recettes qui suivent avec trois herbes sauvages que l’on croise régulièrement l’été. Ce sont toutes des plantes qui supportent mal la cuisson et qui se révéleront davantage dans des infusions à froid pour libérer leurs arômes délicats :
La Berce Spondyle
Heracleum Sphondylium : Les jeunes feuilles et pétioles de Berce sont très aromatiques et évoquent la mandarine, la noix de coco et la feuille de figuier. Elles ne tiennent pas bien la cuisson (sauf à la vapeur) et sont meilleures crues. On peut les utiliser pour la recette du bouillon d’orge ou de l'okrochka ou de la soupe froide de courgettes. (Attention à ne pas la confondre avec la Berce du Caucase).
Les feuilles de figuier
Ficus carica : Considérées comme légèrement emménagogues (qui favoriserait et stimulerait le flux sanguin dans la région pelvienne et l'utérus pendant les règles). Elles sont aussi le symbole de l’abondance tant on les trouve sur une grande partie du territoire français pendant l’été. On évitera de les utiliser dans la recette de l'okrochka, car le latex des feuilles contient du caoutchouc et des enzymes qui digèrent les protéines et font cailler le lait. Elles seront parfaites dans le bouillon Dashi/tomates et le bouillon d’orge froid.
La mélisse
Melissa officinalis : son arôme citronné et délicat disparait dès qu’on l’a cuit. Elle sera parfaite dans toutes les recettes de bouillons ci-dessous au moment d’entreposer votre bouillon au frigo. Elle est traditionnellement considérée comme une alliée de la digestion pour ses vertues : sédative, antispasmodique et stomachique.
Etre sûr.es et certain.es d’avoir identifié la plante et utiliser vos sens pour valider son identification • Cueillir délicatement la plante entre l’ongle du pouce et l’index ou avec des ciseaux pour éviter de les déraciner • ne prélever pas plus de 20% du spot de cueillette • cueillir loin des routes, des chemins, des champs conventionnels • s’assurer qu’il n’y a pas de pollution du sol si c’est sur un terrain vague ou proche de réseaux ferrer, d’usines, de jardins cultivés et des décharges • bien nettoyer en plusieurs eaux votre cueillette avant de consommer les plantes.
Bouillon Dashi, tomates, huile d’olive
J’adore cette recette parce qu’elle présente peu d’étapes et permet, quand il fait chaud, de veiller à l’hydratation tout en se supplémentant en minéraux et en iode, grâce au Kombu. Le dashi est un bouillon de base utilisé quotidiennement au Japon. Il se consomme autant chaud que froid.
Cette recette désaltère, hydrate et sa saveur Umami est totalement additive. Vous pouvez aussi, si c’est plus simple, réaliser cette recette avec un bouillon de légumes riche en gingembre, céleri et fenouil plus facile à trouver pendant vos vacances d’été.
Cette recette de bouillon Dashi est une version végétale sans bonite, car la bonite séchée n’est pas facile à trouver pour les non professionnels. Pour ma part, j’en achète en ligne ou directement sur Paris à l’épicerie Nishikidori.
La bonite apporte cette saveur fumée délicieuse froide comme chaude, mais vous pouvez vous en passer ou ajouter du haddock fumé qui infusera à froid ou même du tofu fumé.
C’est une recette dont les variantes sont infinies. J’ai pu en déguster une version magnifique la semaine dernière chez mon amie la cheffe Alcidia Vulbeau (Bonne aventure, 59 rue des Rosiers, Saint-Ouen-sur-Seine 93400) qui avait infusé son bouillon Dashi de peaux de tomates et dont la maman avait émondé religieusement les petites tomates cerises qui flottaient dedans.
La cheffe Priscilla Tram (TRÂM 130 rue Saint-Maur 75011) en sert une version hyper satisfaisante dans son restaurant fraîchement ouvert tout l’été à Paris. Une belle tomate émondée trône dans un bouillon Dashi agrémenté de concombre et wakamé en pickles.
On sait à quel point les tomates assaisonnées juste avec un peu de sel rendent une grande quantité d’eau. Cette eau associée au bouillon Dashi donne un bouillon sapide et délicieux.
photo Virginie Garnier du livre Epicerie Naturelle
pour environ 2 l préparation : 10 min conservation : 4 jours au frigo
10 g de shiitakés séchés
1 belle pincée de pétales ou flocons de bonite séchée (optionnel)
6 g d’algue Kombu
2 cm de gingembre frais
2 l d’eau filtrée
4 belles tomates d’été, bien mûres
2 brins de basilic (ou de mélisse pour changer)
4 cuil.à soupe d’huile d’olive, de lin,de noix ou de cameline sel, poivre, tamari
Prener un bocal en verre avec un caoutchouc, type Le Parfait®, d’au moins 2 l. Placer les shiitakés, le Kombu et le gingembre (coupés en morceaux) dans le bocal. Verser l’eau bouillante et laissez infuser pendant au moins 1 à 2 h ou au mieux pendant toute une nuit. Vous pouvez le garder pendant 4 jours au frigo. Vous pouvez même le congeler. Mixer le bouillon Dashi avec les tomates bien mûres. Vous pouvez aussi les couper grossièrement au couteau ou les écraser avec une fourchette, si vous préférez avoir plus de consistance. Vous pouvez aussi choisir des tomates cerises comme sur la photo (sans les mixer et/ou les monder). Assaisonner, selon votre goût, d’une petite huile d’olive ou de sésame. Ajouter des feuilles de basilic ou de shizo. Et déguster.
Version avec des peaux de tomates infusées
photo d’Anaïs Boileau
Version avec les tomates mixées avec le bouillon Dashi
En faire un plat principal avec des nouilles fraiches maison
Vous pouvez agrémenter ce bouillon froid de nouilles froides japonaise de type soba (farine de sarrasin) que l’on trouve dans les magasin bio. Des Somen à la farine de froment que l’on trouve en épicerie Asiatique, j’en commande de temps en temps une bonne quantité de chez Nishikidori . On peut utiliser aussi des nouilles de riz (magasin bio). Mais vous pouvez très bien faire vous même vos Udon, d’épaisses nouilles de blé fabriquées à partir de seulement trois ingrédients de base : la farine de blé, de l’eau et du sel. L’un des avantages des udon est leur simplicité de préparation. Contrairement à certaines autres variétés de nouilles, vous n’avez pas besoin d’une machine à pâte sophistiquée. Voici une recette très simple et délicieuses :
200 g de farine
95 g d’eau
10 g de sel de mer
Etapes
Dissoudre le sel dans l’eau.
Mettre la farine dans un bol et ajouter l’eau petit à petit en pétrissant jusqu’à obtenir une boule de pâte, pas très humide mais il ne doit plus rester de farine sur les bords du bol
Filmer votre boule et laisser reposer 45min
Retravailler la boule en l’aplatissant et la reformant plusieurs fois
Mettre votre boule dans un sac de congélation et l’aplatir à l’aide d’un rouleau à pâtisserie. Laisser reposer au frigo 2 à 3 heures.
Préparation des nouilles
Sur un plan de travail propre, ajouter de la fécule de maïs (ou de la farine), déposer la boule, y ajouter un peu de fécule de maïs également et l’aplatir avec vos mains en faisant attention que la pâte ne colle pas.
Étendre la pâte pour former un carré de 3 mm d’épaisseur. Tourner la pâte de 90° régulièrement pour vous aider. Plier la pâte en accordéon et ajouter de la fécule entre chaque rabat pour éviter que la pâte se colle sur elle-même. À l’aide d’un grand couteau bien aiguisé, couper des nouilles de 3 mm d’épaisseur. Puis les passer dans un peu de fécule de maïs pour qu’elles ne collent pas entre elles.
Cuire les nouilles dans de l’eau bouillante salée pendant env 10 minutes. Les égoutter puis les rincer sous un filet d’eau froide en les frottant pour enlever l’excédent d’amidon.
Servir dans le bouillon froid.
Le Bouillon froid à l’orge inspiré de Michel Bras
Ça fait plus de 10 ans que son livre trône dans ma bibliothèque et que je le feuillète comme un livre d’art sans jamais faire de recettes. C’est pourtant une mine d’or d’idées et d’associations gustatives. J’utilise l’orge depuis très longtemps et je suis adepte des bouillies d’orge l’hiver, comme des congees. J’étais heureuse de tenter cette version froide et estivale qui est une pure merveille. Elle peut être servie comme un plat. J’ai ajouté du concombre à la version initiale.
L’orge est une céréale peu utilisée alors que c’est une grande reminéralisante. On l’a conseillé en cas d’asthénie et de grandes fatigues en médecine chinoise. Riche en fibres, c’est la céréale la plus énergétique que l’on donne aux chevaux. Attention cependant pour les intestins fragiles, car elle contient du gluten et ne conviendra pas à tout le monde. On en trouve dans tous les magasins bio, épiceries fines, et parfois en grande surface.
Pour les intolérants au gluten, une version avec du riz ou du sarrasin sera à privilégier, mais je conseillerai plutôt de cuire le riz/sarrasin à part et de le servir minute à température ambiante dans le bouillon froid.
Pour les chanceux.ses qui ont du freekeh (blé vert fumé), vous pouvez le substituer à l’orge, le goût fumé du freekeh est divin froid et on l’utilise trop peu de cette façon. On en trouve en magasin bio mais je pense que c’est plus facile sur Paris et dans les grandes villes.
Bouillon d’orge
300g d’oignons ciselés
60g de beurre
1 demi gousse d’ail
300g d’orge perlé
2L d’eau
100g de celeri
100g de fenouil
100g de concombre
poivre, sel, (ou tamari, ou sauce poisson)
dulse (optionnel)
Suer les oignons ciselés avec le beurre et ajouter l’orge pour les nacrer comme pour un riz pilaf. Ajouter la demi gousse d’ail ciselée et mouiller avec l’eau et cuire à couvert à petit bouillon pendant 45 min. Remouiller avec de l’eau au cours de la cuisson si nécessaire. Retirer du feu et ajoutez-y le céleri, le fenouil ciselé finement. Laisser infuser 20 min à couvert. Rectifier l’assaisonnement en ajoutant du sel, du tamari ou de la sauce poisson selon vos goûts de salaison. Vous pouvez aussi rajouter des algues fraîches, désalées ou déshydratées (optionnel) si vous en avez. Une pincée de Dulse par personne marche très bien dans ce bouillon.
Réserver au frais au moins deux heures et idéalement une nuit. Le lendemain, ajouter un peu d’eau si la texture est trop compacte. Éplucher et ciseler finement le concombre. L’ajouter au bouillon et servir froid.
l’Okroshka le plus rafraichissant
Je vous avais promis plusieurs versions de cette soupe froide d’été d’Ukraine et de Russie. Son nom peut être rapproché du russe крошить (krochit) ou de l'ukrainien кришити (krichiti), qui signifient « émietter ». Cette version végétarienne de l’Okroshka est préparée avec du kéfir. Elle est parfaite pour les journées chaudes d’été. J’aime ajouter des œufs de truite ou de saumon, mais vous pouvez très bien vous en passer. Une version toute simple avec des oeufs durs écrasés dedans conviendra tout aussi bien et sera plus économe.
Le lait ribot ou le kéfir se trouve au rayon frais à côté du lait frais dans toutes les grandes surfaces (ex. : marque paysan breton). Mais moi, je l'achète en magasin bio, Biocoop ou Naturalia. J'achète la marque Kerguillet pour le lait Ribot et le kéfir de lait.
Photo d’Anaïs Boileau pour mon livre à paraitre sur les Bouillons bienfaisants aux éditions Hachette cuisine
1 botte de radis, tranchés finement (environ 250 ml/1 tasse)
2 oeufs durs émiettés, hachez ou coupés en morceaux
1 branche de celeri branche
1 pomme de terre bouillie, coupée en cubes
1 grand concombre, coupé en deux, épépiné et coupé en petits cubes
1 botte d’oignons verts, les parties vert foncé et vert pâle, tranchées finement (environ 250 ml/1 tasse)
250 ml (1 tasse) d’aneth frais, haché finement (vous pouvez remplacer par de la coriandre selon vos goûts).
500 ml (2 tasses) de kéfir 1 %
45 ml (3 c. à table) de jus de citron (environ 1 citron)
4 cas d’huile d’olive (ou colza, cameline, noix riches en oméga3)
20 feuilles de plantes aromatique au choix (verveine, thym citron, basilic, menthe)
Sel au goût
200ml de bouillon de légume froid ou bouillon Dashi pour régler la consistance (optionnel)
La veille, mettez dans votre bouteille de kéfir des plantes aromatiques (verveine, basilic, thym, citron, zestes de citron, citronnelle) qui infuseront à froid. Le lendemain, dans un grand bol, mélanger la pomme de terre bouillie et les œufs cuits durs (ils doivent être à température ambiante) avec le concombre, le céleri et les radis ciselés finement à l’aide d’une mandoline ou d’un couteau d’office. Ajoutez aussi les oignons verts et l’aneth ciselés très finement. Verser le kéfir sur le mélange, ajouter le jus de citron, un peu d’huile d’olive ou de colza, de cameline ou de noix, et remuer pour bien mélanger. Réfrigérer. Au moment de servir, ajouter les œufs de truite (optionnel) et déguster.
Astuces :
Si la consistance est trop épaisse, ajoutez du bouillon de légumes lorsque tous les ingrédients ont été mélangés.
Préparez la soupe la veille (sauf les œufs de truite) et conservez-la jusqu’à 3 jours au réfrigérateur. Elle sera encore plus infusée.
Soupe froide de courgettes au haddock fumé
La saveur fumée dans les soupes et bouillons froids marche particulièrement bien.
Dans cette recette extrêmement simple, on ajoute au moment de mixer un morceau de haddock (ou de poisson) fumé que l’on trouve facilement au rayon frais des grandes surfaces. Pour une version végétale, vous pouvez le remplacer par du tofu fumé (magasin bio), de la ricotta fumée (épicerie italienne), un simple sel ou un vinaigre fumé de qualité. Les profils les plus téméraires et techniques peuvent s’aventurer à faire fumer (au foin) eux-mêmes les courgettes avant de les mixer ou le fromage de chèvre frais.
pour environ 2 l préparation : 10 min conservation : 5 jours au frigo
500 g de courgette
1/2 d'oignon jaune
1/2 fromage de chèvre frais
Sel, poivre,
1 cas d’huile d’olive,
4 cas d’huile d’olive, de lin, de colza ou de cameline ou d’un mélange de plusieurs huiles.
de l’eau pour régler la texture.
Un ingrédient fumé au choix : haddock, hareng, poissons fumés au bois, ou du tofu fumé, de la Ricotta fumée, un sel ou un vinaigre fumé.
Éplucher l'oignon et l'émincer. Dans une casserole, faire chauffer un peu d'huile d'olive puis ajouter l'oignon émincé. Faire cuire jusqu'à ce que l'oignon soit bien tendre, translucide, voire qu'il colore légèrement.
Ajouter ensuite la chair de courgette et faire cuire environ 6 min à feu moyen.
Une fois revenu à température, mixer à l’aide d’un blender ou à l’aide d’un mixeur plongeant l’ensemble avec le chèvre, l’ingrédient fumé, le sel, le poivre, les 4 cas d’huile, un peu d’eau pour fluidifier la texture.
Rectifier l’assaisonnement et réserver au froid au moins 2 h pour que la saveur fumée infuse la soupe froide (elle sera meilleure le lendemain).
Bonne dégustation ! Merci d’avoir lu et rejoignez-moi pour plus de contenu.
Merci beaucoup pour ces recettes ! Je consomme surtout le dashi l’hiver et c’est une magnifique idée de le faire ainsi. D’ailleurs, j’ai beau chercher c’est toujours plein de E—-
Y a t’il d’autres alternatives au dashi en poudre des magasins asiatiques pour agrémenter une soupe miso?
Merci
Toujours aussi fan de ton travail 🤩Merci pour ces superbes idées !