Se nourrir quand rien ne va
Carnet de 10 recettes pour vous soutenir en cas de déprime saisonnière et autres moments de vulnérabilité.
Cette semaine vient de sortir Bouillons bienfaisants aux éditions Hachette Cuisine et vos retours me mettent déjà en joie. Merci pour l’accueil que vous lui avez réservé!
Carnet de recettes dispo en bas de cette newsletter
Je viens de passer une semaine délicieuse entourée de ma famille et d’une de mes amies d’enfance les plus précieuses. J’ai toujours identifié, mais jamais su expliquer ce que sa présence avait d’essentiel à ma vie, puisqu’à part un parcours scolaire commun, peu de nos centres d’intérêts se rejoignent vraiment. On s’est connu dans l’enfance, juste avant l’adolescence. Elle m’a tout de suite semblée à part, géniale dans sa différence, particulièrement attachante, loufoque et d’une intelligence hors norme.
Le temps façonne le lien, le lime ou le renforce. Parfois, certaines amitiés sont surtout des gardiennes et témoins bienveillantes mais perspicaces des différentes strates géologiques qui nous constituent. Elles ont vu des sédiments de nos personnalités se superposer pour donner vie à nos multiples facettes, elles en ont gardé des petits bouts de nous, tout en restant à la lisière, discrètes et bienveillantes, sans jamais juger et ce, malgré un lien qui a pu parfois se distendre.
Cette semaine fut d’autant plus précieuse qu’elle sort tout juste d’une longue dépression. Notre temps ensemble fut ponctué de moments simples, de tâches répétitives comme d’éplucher des châtaignes, de cueillir et nettoyer des champignons, de peler des pommes, de découper des légumes et de décortiquer des noix et je l’ai vu prendre un plaisir immense, une facétie et une joie d’enfant à faire la cuisine alors qu’il y a peu de temps, aucune de ces tâches n’aurait été envisageable pour elle et le simple fait d’y penser l’aurait convaincu de rester au lit.
De l’eau chaude, une cuillère de miso et une botte de persil ciselé pour un en-cas simple
J’ai déjà évoqué dans une précédente newsletter le dilemme et la difficulté de cuisiner pour soi quand on va mal, qu’on se sent vulnérable et déprimé. La dépression, le blues, les périodes de down qui pèsent une tonne et l’incapacité de prendre soin de soi puisque le moindre geste semble une montagne à gravir. Mes expériences personnelles, puis nos discussions m’ont permis de décortiquer un grand nombre de problématiques associées au fait de se nourrir correctement quand tout s’effondre à l’intérieur, puis à l’extérieur.
On s’est remémoré avec tendresse la fois où j’ai tenté de distiller des conseils de santé et où je l’ai vu les yeux affolés regretter sa question à la minute où je répondais par des phrases trop longues, ou un mot inconnu de son jargon quotidien : curcu-quoi ? Mais on trouve ça ou la sauce poisson ? Moi-même, lors d’une période compliquée, alors que j’avais tout sous la main, je me contentai de simples bols de riz ou de boites de sardines…
La chute, cette phase ou rien n’est possible
La dépression est une maladie psychique bien plus fréquente que l’on pense et il en existe plusieurs formes. En 2021, on estime à 3 millions de Français.es qui ont été, sont ou seront soumis à un été dépressif. Parmi eux : 66 % femmes, 34 % hommes.
La dépression prend différentes formes :
Déprime passagère, saisonnière, dépression atypique (Hypersomnie, troubles alimentaires, impression de rejet social et forme paranoïde) Difficulté à assurer son quotidien, dépression exogène ou réactionnelle, dépression endogène : mélancolique, dépression du post-partum : baby blues, déni de grossesse, psychose puerpérale.
La dépression peut être associée à d’autres troubles psychologiques (spasmophilie, troubles bordelines, bipolaires, paraphrénie, troubles schizophréniques). Elle arrive aussi très fréquemment chez des profils neuro-atypiques mal diagnostiqués (HPI, TSA, THDAH) comme l’évoque la géniale dernière newsletter sur le genre et le TDAH de Lauren Bastide ici.
La dépression est parfois ponctuelle et souvent cyclique, mais une chose est sûre : on ne l’a souhaite à personne, même pas à son ou sa meilleure ennemie.
Les diagnostiques reposent sur les ressentis des patient es. Le comportement raconté par l’entourage et un examen psychologique mis en place par un praticien de santé (médecin, psychiatre). Il n’existe pas d’examen biologique spécifique.
60 % des réponses sont médicamenteuses, prescrites par des médecins sous forme d’antidépresseurs tricycliques ou IRS et/ou anxiolytiques : qui permettent un relâchement des muscles et calment l’anxiété), et 40 % d’un accompagnement psychologique pour en comprendre la cause, permettre au patient.e d’intégrer sa structure et d’apprendre à vivre avec.
L’accompagnement naturopathique se concentre essentiellement, mais surtout humblement, sur l’éducation de santé, l’alimentation, la réorganisation des rythmes, la mise en place d’une hygiène de vie comprenant : activité physique, exercices de respiration ou de méditation, et la qualité du sommeil.
Oui, mais encore une fois, il y a l’idéal sur le papier et ce qu’on peut faire et mettre en place. C’est pour ça que je vous ai concocté un carnet de 10 recettes faciles mais nourricières qui font du bien et surtout très accessibles quand on a très peu de jus pour ‘faire’.
C’est une période où se nourrir est systématiquement compliqué. Il y a les personnes qui ne pourront rien avaler, et celles qui, à l’inverse, auront besoin de beaucoup manger. L’accompagnement variera en fonction de ces deux profils, mais une chose est sûre : on veillera à privilégier la qualité des ingrédients avec l’idée de rajouter de bons nutriments plutôt que d’être dans une approche restrictive.
Si vous ne voulez manger que des pâtes la bonne nouvelle c’est que vous pouvez les garder au menu, on va juste rajouter deux trois petites choses autour pour optimiser votre forme.
On évitera cependant de préférence les ingrédients raffinés, les sucres rapides, l’alcool, et il est possible de faire des recettes avec très peu d’ingrédients, de gestes, d’étapes et de temps pour se simplifier la vie plutôt que d’opter pour des plats préparés.
Quoiqu’il arrive pendant cette période, on va chercher à favoriser des recettes de préférence chaudes, on boit beaucoup d’eau, de tisanes, et on en profite pour cuisiner des légumes racines (carottes, betterave, camas), carotte, céleri-rave, cerfeuil tubéreux, panais, chou-rave, gingembre. C’est en plus la saison ! Pour cela on ne s’embête pas avec des découpes compliquées, on coupe grossièrement en deux et on fait griller au four sur plaque ou dans une cocotte avec un fond d’eau d’huile d’olive et de sel
Puisqu’elles sont particulièrement simples d’emploi, on mise sur la qualité des céréales (orge, avoine, riz complet, petit épeautre) de préférence complètes, et riches en fibres. On veille à la qualité du sel (sel de mer), on favorise des préparation onctueuses, crémeuses, réconfortantes, des purées écrasées grossièrement à la fourchette émulsionnées avec des huiles riches en oméga 3 (cameline, noix, colza).
On mise sur les œufs sous toutes leurs formes pour un apport en protéines de bonne qualité. Des cuisson de 1 à 5 min au plus.
On lance une grande marmite de bouillon où on jette dedans ce qu’on peut, même si ce sont juste trois oignons, une gousse d’ail et une carotte défraichie. On demande à sa famille, à ses amies de nous prendre faire les courses, on recherche la présence des autres, même si c’est l’inverse qu’on a envie de faire. Entourez-vous ! Pendant cette période, ce sont peut-être les courses qu’on fait ensemble plutôt que de boire des cafés, et c’est bien aussi.
On se ménage en préparant plus, on congèle, on baisse ses exigences et, même si ça me coute de dire ça, on s’approvisionne chez un certain fournisseur de légumes pré-découpés et congelés, parce que voilà, il vaut mieux ça que de manger des pâtes tous les jours.
On parsème ses plats de germe de blé riche en vitamine du groupe B pour soutenir le système nerveux. Le germe de blé est très abordable et on le trouve au magasin bio et en grande surface. À la rigueur, on se le fait offrir… Ça coute moins de 4 euros. On mise aussi sur les algues déshydratées qui se stockent facilement. On grignote des oléagineux, des amandes, et surtout des noix de Grenoble riches en oméga 3. Les bananes, les pommes, les poires deviennent des alliées.
‘Le beau’ nourri nos cinq sens dans cette perte de sens.
Se faire du bien en composant une jolie assiette, ce qui peut se résumer à couper une carotte en petits morceaux, couper un avocat en deux, ouvrir une boite de sardines, parsemer trois amandes, et déguster tout ça avec des crakers. Mais on va prendre le temps de composer cette jolie assiette, d’y mettre des couleurs. Les radis d’hiver, red meat, blue meat sont comme des arcs-en-ciel, je ne connais personne qui n’aime pas les arcs-en-ciel.